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Les femmes qui suivaient Jésus dessins de Eloy Roy |
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DES SOEURS RACONTENT LEUR VOCATION
Je suis entrée au monastère le 28 janvier 1978, il y a donc 36 ans passés. J’en avais alors presque 22, je vous laisse faire le calcul ! Comment cela s’est-il fait ? Je me rappelle qu’en venant faire un premier séjour incognito à l’hôtellerie, en août de l’année précédente, avec une religieuse du service des vocations qui connaissait l’endroit, je m’étais dit en moi-même : « Maintenant, je ne crois plus au hasard ». Mon arrivée en ce lieu m’apparaissait comme l’aboutissement d’un long parcours, celui de ma vie, dont les hauts et les bas, les tours et les détours se reliaient et prenaient sens pour m’avoir finalement amenée ici. Quelques jalons ressortaient. En particulier l’épisode de ma communion solennelle. Au moment du renouvellement de la profession de foi, quand l’officiant nous avait demandé si nous renoncions « à Satan et à ses pompes », je n’avais pas eu de problème pour affirmer « oui, je le rejette ». Mais lorsqu’il en est venu à « croyez-vous en Dieu », je me suis soudain aperçue que ce n’était pour moi qu’un mot vide de sens et, au milieu des autres qui répondaient « nous croyons », j’ai dit : « je ne sais pas » ! J’avais comme saisi d’instinct qu’en face d’une telle question, je ne pouvais honnêtement faire acte de foi que s’il y avait vraiment quelqu’un. Cette prise de conscience d’une absence, qui correspondait avec les débuts de mon adolescence, a marqué le point de départ d’une période de doute, de non-sens croissant de tout. La lecture du « Ainsi parlait Zarathoustra » de Nietzche constitue un autre jalon, en ce qu’elle a généré en moi, par je ne sais quelle opération, une intuition de l’absolu. Mais cet absolu était sans visage, hors de portée. Je m’enlisais dans un sentiment de relatif total et insatisfaisant. Après un bac philo, j’ai voulu arrêter les études et travailler, pour voir si, en vivant comme tout le monde, cela irait mieux. Ces trois années en équipe informatique m’ont humainement beaucoup apportées. Mais je ne trouvais pas de sens à la vie, à ma vie. Jusqu’au point zéro où tout s’abîme … C’est alors que la « rencontre » se produisit. J’étais abonnée au Club français du livre et dans le catalogue que je reçus à ce moment là où je touchais le fond, il y avait une Bible de poche proposée à la vente. J’ai eu faim de cette Parole que je ne connaissais pas et je l’ai commandée. Ensuite, quand je l’ai eue en main, j’ai décidé de la lire en suivant et sans parti pris. Ainsi, chaque soir, avant de m’endormir, je lisais quelques pages dans mon lit, avançant au fur et à mesure avec ce peuple dont les résistances m’étonnaient, étonnez-vous ! J’arrivai ainsi, le 10 janvier 1977, au chapitre 53 du livre d’Isaïe, ce qu’on appelle le quatrième chant du serviteur. En reconnaissant dans ce serviteur le Christ « transpercé à cause de nos fautes, et dans ses blessures se trouvait notre guérison », je me suis ouverte à la présence de Celui que les paroles du prophète annonçaient en vérité. Le Christ a fait brèche en moi à travers ces mots et j’ai cru en Lui. Le lendemain matin, c’était comme si l’on m’avait rincé les yeux à grande eau. Dès lors ma vie prenait un tournant à 180 degrés. Puisque le Christ prenait sur lui ce qui m’empêchait de vivre, puisqu’il donnait sens à ma vie, ma vie était pour lui. Quelques semaines plus tard, alors que je partais promener mon chien, j’ai aperçu en contrebas le curé du village qui fermait ses volets. J’avais le choix : ou tourner à droite vers la forêt, comme j’en avais initialement l’intention, ou descendre à gauche pour lui parler, ce que j’ai fait. C’est ce prêtre qui, après que je lui aie raconté ce qui m’était arrivé, m’a mise en contact avec la religieuse du service des vocations. Mon retour à l’église était pour moi le signe que c’était vraiment le Christ que j’avais rencontré. Dès le départ j’ai pensé à la vie monastique, que je ne connaissais qu’à travers quelques livres et qui plus est, dans sa version bouddhiste ! Mais mon désir était de rejoindre des personnes qui vivaient cette expérience du Christ afin d’apprendre moi-même à y avancer. Cette rencontre initiale reste le fondement de ma vie monastique, le socle sur lequel elle se déploie au fil des années. C’est dans de ce sens que j’avais inscrit sur le faire part de ma profession solennelle le « me voici puisque tu m’as appelé » du jeune Samuel. Je n’avais pas d’autre raison d’être là. L’appel du Christ continue de me précéder et je lui réponds en le cherchant dans la liturgie, la lectio divina, la vie fraternelle au quotidien. Lors du premier passage au monastère évoqué plus haut, j’avais trouvé dans la bibliothèque de l’hôtellerie une présentation de la vie cistercienne et j’y avais reconnu ce que je portais au fond de moi. J’en parlerais aujourd’hui en termes de simplicité. Les fondateurs de Cîteaux recherchaient une relation simple avec le Dieu simple. Ce que cela implique comme dépouillement pour une plénitude de communion avec soi, avec les autres, avec Dieu, a trouvé une actualisation particulière dans l’expérience du regroupement que nous vivons au Val d’Igny. De quoi aller de l’avant dans l’adhésion au Christ présent et agissant ici et maintenant. Soeur Christine |
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Les personnes consacrées peuvent et doivent repartir du Christ car c'est lui qui, le premier, est venu à leur rencontre et qui les accompagne sur le chemin. Leur vie est la proclamation du primat de la grâce; sans le Christ elles ne peuvent rien faire ; elles peuvent tout, en revanche, en celui qui donne la force. Repartir du Christ signifie proclamer que la vie consacrée est une suite du Christ spéciale, mémoire vivante du mode d'existence et d'action de Jésus comme Verbe incarné par rapport à son Père et à ses frères. Cela comporte une communion d'amour particulière avec lui, qui est devenu le centre de la vie et source permanente de toute initiative. Il s'agit, comme le rappelle l'exhortation apostolique Vita consecrata, d'une expérience de partage, d'une grâce spéciale d'intimité, il s'agit de s'identifier à lui, en ayant les mêmes sentiments et la même forme de vie; il s'agit d'une vie saisie par le Christ, que la main du Christ touche, que sa voix rejoint, que sa grâce soutient. (Repartir du Christ n°21-22) |
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"Zachée, descends vite, je veux aller chez toi" (Lc 19,1-10) |
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DES SOEURS RACONTENT LEUR VOCATION
Comment m'est venue la vocation religieuse ?...et à Igny ? Avec une de mes amies nous nous occupions de pas mal de choses dans notre paroisse, tout au moins de ce qui était possible pour des personnes habitant en banlieue parisienne et travaillant à Paris. Il y avait en particulier un groupe de jeunes filles sans étiquette d'action catholique, plutôt genre « cercle », dont nous assumions la responsabilité avec un des vicaires de la paroisse. Nous étions à l'église presque toute la matinée du dimanche, à la schola pour la grand'messe, surveillant les enfants à leur célébration, quêtant à la messe de 11 heures ! et assurant entre les messes une petite bibliothèque paroissiale. Un jour, je dis à mon amie : « On s'occupe de beaucoup de choses, il faudrait peut-être se ressourcer un peu, en faisant une petite retraite ». Elle me demande de m'en occuper. Je téléphone au Cénacle de Montmartre (hélas il n'existe plus...) et nous prenons date pour un prochain week-end. Il fallait nous faire remplacer pour tout ce que nous assumions le dimanche, je lui dis : « Si nous disons qu'on va faire une retraite, ils vont penser : Elles veulent entrer au couvent ! » Elle me répond : « Vas-y d'abord, j'irai après! » - je ne savais pas que le Seigneur l'appelait déjà, mais qu'elle n'avait pas très envie de lui répondre !... Nous y allons, sans trop nous presser d'ailleurs, un samedi pour le week-end. Là, une sœur nous reçoit et - sans doute savait-elle y faire -, la conversation vient à un point où je lui demande « Mais comment sait-on qu'on a une vocation religieuse ?» A ce moment, question de simple renseignement, sans idée derrière la tête. Elle nous répond : « Nous, (elles sont de formation jésuite je crois, au Cénacle) on conseille de faire deux colonnes, les raisons contre et les raisons pour ». Je pense que ce n'est pas bête et après un temps à la chapelle, je m'en souviens et me mets à le faire. Deux colonnes, une « contre » et une « pour ». La première était remplie du haut en bas de la feuille, il n'y avait qu'une seule chose écrite du bon côté ... et c'est celle-là qui l'a emportée. Je n'ai jamais dit à personne cette chose, cela est resté entre Lui et moi. Là-dessus, il fallait préciser le comment et le où ... C'était le moment où avait paru un petit livre dont j'ai oublié l'auteur : « Trois ans à la Trappe ». Je connaissais La Trappe pour les hommes, je ne savais pas qu'il y avait aussi des monastères de femmes. Je connaissais et avais fréquenté Saint Wandrille plusieurs années pour le Jeudi Saint, car nous passions les vacances de Pâques dans ce coin. J'avais eu aussi l'occasion d'aller plusieurs fois chez les Bénédictines de Vanves où avait lieu des réunions ou des rencontres, je ne sais plus trop de quoi. J'y ai déjeuné une fois à la même table que Mgr Roncalli, alors Nonce à Paris ! Donc ce livre, pas trop favorable ! m'a tapé dans l'œil ou plutôt dans le cœur, et voilà comment je me suis tournée vers Igny pour faire ma première retraite. Soeur Marie-Thérèse |
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La suite du Christ est une réponse d'amour à l'amour de Dieu. Si nous aimons c'est parce qu'il nous a aimés le premier. Cela signifie reconnaître son amour personnel avec cette profonde conscience qui faisait dire à l'Apôtre Paul: « Le Fils de Dieu m'a aimé et s'est livré pour moi » … Les vœux par lesquels les personnes consacrées s'engagent à vivre les conseils évangéliques confèrent tout leur caractère radical à la réponse d'amour. La virginité élargit le cœur à la mesure de celui du Christ et rend capable d'aimer comme il a aimé. La pauvreté rend libre de l'esclavage des choses matérielles et des besoins artificiels auxquels pousse la société de consommation, et elle fait redécouvrir le Christ, l'unique trésor pour lequel il vaut vraiment la peine de vivre. L'obéissance place entièrement la vie entre ses mains, afin qu'il la réalise selon le dessein de Dieu et en fasse un chef-d'œuvre. Il faut avoir le courage d'entreprendre une suite du Christ généreuse et joyeuse. (Repartir du Christ n°22) |
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Je suis l’aînée d’une famille de quatre enfants. Papa était fromager, nous étions à la campagne. Comme tous les petits enfants, vers l’âge de 3 ou 4 ans, je m’émerveillais devant les fleurs des champs et des bois. Maman me disait : « C’est le bon Dieu qui fait pousser les fleurs ».Et, devant les beautés de la nature, les animaux, la neige en hiver : « C’est le bon Dieu qui fait tout cela ». Il naissait en moi une admiration de Dieu, je me disais : « Dieu est bien grand et puissant pour faire de si belles choses ». Le dimanche après midi, nous faisions une visite au Saint-Sacrement, maman me disait que Dieu est là … alors j’y croyais ferme et j’aimais rester là près de Lui un petit moment. Au catéchisme, vers l’âge de 9 ans, je désirais être toute à Dieu plutôt que de me marier. Puis, lors de ma communion solennelle, mon désir de vie religieuse s’accrut. Le prédicateur, durant son sermon, a répété plusieurs fois : « Nous manquons de prêtres, nos manquons de religieuses ». Alors, cela m’a frappée. Intérieurement, j’ai dit au Seigneur : « Si tu manques de religieuses, moi je veux bien, appelle-moi ». Alors cela a suivi son chemin. Je fis quatre ans d’études secondaires chez des religieuses enseignantes, puis une année d’école ménagère. Pour gagner ma vie, je fis des surveillances dans le collège des Sœurs et j’enseignai aussi. Là, je me rendis compte que ma vocation n’était pas d’être religieuse active. Je priais le Seigneur de m’éclairer. Entre temps mes parents avaient déménagé et habitaient à 6 kms du monastère cistercien de la Grâce-Dieu. Pendant les vacances je prenais ma bicyclette et allais du côté du monastère. Ce lieu m’attirait par sa beauté et surtout parce que j’y « sentais » Dieu présent. C’était comme un aimant et un amant qui m’attirait. J’avais 20 ans quand j’ai dit au prêtre de ma paroisse : « Je veux entrer à la Grâce-Dieu ». Il n’a pas eu l’air trop surpris et m’a encouragée. Alors, à l’automne 1960, j’avais 21 ans, j’entrai au monastère. Soeur Jeanne-Antide |
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La vie consacrée ne cherche pas les louanges ni les éloges des hommes; elle est récompensée par la joie de poursuivre effectivement son travail au service du Royaume de Dieu, afin d'être un germe de vie qui grandit dans le secret, sans attendre d'autre récompense que celle que le Père donnera à la fin. Elle trouve son identité dans l'appel du Seigneur, dans la suite du Christ, amour et service inconditionnés, capables de remplir une vie et de lui conférer pleinement son sens. (Repartir du Christ n°13) |
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Je vais avoir 84 ans et, dans quelques mois, je me réjouirai d’être entrée voici 60 ans dans la vie cistercienne. A me rappeler mon itinéraire, je le vois conduit par le Seigneur d’une manière tellement étonnante et finalement déterminée. Mais je sais qu’Il appelle à Lui chaque chrétien selon une vocation particulière, correspondant à son être, et déterminant l’aspect le plus personnel de son histoire. Je suis née dans une famille profondément chrétienne. Enfance empreinte du désir de Dieu, plusieurs années d’adolescence secrètement taraudées d’inquiétude spirituelle. Puis les grandes envolées sur la beauté du mariage chrétien. Mais non, l’appel du Christ dépasse tout cela. Je serai à lui dans une vie religieuse consacrant la virginité et demandant le renoncement à tout. Démarche sincère mais imprégnée de l’inconsciente sentimentalité de mes 18 ans. C’est normal : l’éveil de la vocation saisit l’âme humaine là où elle en est, et, si elle y répond, la fera évoluer. Mais, concrètement ? Le service des vocations n’existe pas encore. La vie religieuse m’apparait principalement sous l’aspect des sœurs dominicaines qui tiennent l’Institution où j’achève les études secondaires. C’est tout indiqué : j’ai de l’attrait pour l’enseignement, et une attirance forte pour la théologie, avec quelque fréquentation de Thomas d’Aquin ! Je serai donc dominicaine enseignante (aucun attrait pour le grand Ordre).Et je prends contact avec la Sœur directrice de l’Institution et la Prieure générale de la congrégation. Mes parents ? Maman est comblée. Papa se défend avec un argument facile : « Quand tu seras majeure, on en reparlera ». Je vais mettre à profit cette attente en entreprenant la nécessaire licence classique. Et c’est alors que le Seigneur intervient d’une façon inattendue. Durant une excursion en vacances, une amie et moi échangeons le secret de notre vocation. Elle postule dans ce qui s’appelait alors une Trappe, et moi, je serai dominicaine enseignante. Et elle, très simplement : « Je vous aurais vue dans la vie contemplative ».Cette seule phrase, d’une personne me connaissant et me voyant vivre, a bouleversé mon horizon. Rationnelle comme je suis, et poursuivant un projet aussi ferme, il ne peut s’agir d’un changement fantaisiste : l’Esprit Saint qui souffle où Il veut, a dévoilé sa véritable intention à mon sujet au travers d’une parole sans mandat, qui autrement m’aurait fait sourire. Et c’est ainsi que je suis entrée dans la vie cistercienne, alors que mon amie en a été empêchée par certaines circonstances ! Rude apprentissage, obscure recherche du Seigneur, à l’école de l’Ecriture sainte, de saint Benoît et de saint Bernard. Après bien des années, je vois certains fruits de paix et de maturité spirituelle qui ont commencé à germer dans mon cœur. Mais l’attente de Sa venue doit être fidèle et inconditionnelle, en réponse à son amour gratuit. Nuit et jour, la psalmodie nous le fait dire : « Ecoute, Seigneur, je t’appelle. Pitié, réponds-moi. C’est ta face, Seigneur, que je cherche : ne me cache pas ta face … L’œil usé d’attendre tes promesses, j’ai dit : quand vas-tu me consoler ? » (Ps 26 et 118). Nos Pères de l’âge d’or cistercien encouragent cette longue quête. Voici la réponse que Gilbert de Hoyland fait dire à l’Epoux, le Christ : « Actuellement, tu es l’épouse, mais ce que tu seras n’apparaît pas encore. Au profond de moi, tu es déjà celle que tu seras … », celle que Je ferai. Soeur Cécile |
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Si aucun des Instituts ne peut prétendre à la pérennité, la vie consacrée n'en continuera pas moins à nourrir parmi les fidèles la réponse de l'amour envers Dieu et envers les frères. Pour cela, il est nécessaire de distinguer entre le destin historique d'un Institut déterminé ou d'une forme de vie consacrée et la mission ecclésiale de la vie consacrée comme telle. Le premier peut se transformer à cause des changements dus aux circonstances, la seconde est appelée à durer. Cela est vrai pour la vie consacrée de forme contemplative comme pour celle qui est vouée aux œuvres d'apostolat. Dans son ensemble, sous l'action toujours nouvelle de l'Esprit, elle doit toujours donner son témoignage éclairant de l'unité indissoluble entre l'amour de Dieu et l'amour du prochain, comme mémoire vivante de la fécondité, même humaine et sociale, de l'amour de Dieu. Les nouvelles situations de pénurie doivent donc être abordées avec la sérénité de ceux qui savent qu'il est demandé à chacun plus l'engagement de la fidélité que la réussite. (Vita consecrata n°63) |
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DES SOEURS RACONTENT LEUR VOCATION
Je m’appelle Sœur Joëlle, je suis entrée à Igny il y a 18 ans et j’ai 61 ans. Rien ne me prédestinait à la vie religieuse et encore moins à la vie monastique. Mes parents ont grandi dans la foi catholique et nous ont élevées, ma sœur et moi dans cette même foi. Mais seule maman pratiquait et papa la suivait à la messe le dimanche. La religion n’était jamais abordée à la maison et mes grand parents maternels, que seuls j’ai connus, ne pratiquaient pas. A la suite de ma retraite de profession de foi à 11 ans, j’ai juste dit, un jour que nous faisions un repas de famille, que cela me plairait d’être religieuse. J’ai compris que c’était une chose dont il ne fallait pas parler et je n’en ai jamais reparlé. J’ai ensuite fait mes études, à la fin de celles-ci, j’ai eu un grave accident de circulation (renversée par une voiture). Ce fut un premier « électro choc » car j’en suis sortie, je dirai, miraculeusement et à cette époque, faisant partie de l’aumônerie des étudiants des grandes écoles de cette ville universitaire, je me suis posée à nouveau la question de la vocation religieuse. J’ai commencé à travailler mais lors de mon premier emploi, un deuxième « électro choc » m’a fait repenser à cet appel entendu, j’ai perdu accidentellement mon fiancé ce qui après un moment de révolte m’a rapprochée curieusement de Dieu. Après avoir déménagé, je me suis installée dans la Marne où j’y ai travaillé quatorze ans d’abord à Chalons en Champagne puis à Reims. Durant toute cette période, habitant dans un petit village, je me suis investie dans ma paroisse au niveau de l’animation. Le jubilé de notre curé a été l’occasion de créer une petite chorale paroissiale (regroupant 12 clochers à l’époque). Nous avons commencé à une dizaine de personnes et celle-ci continue encore aujourd’hui avec environ une cinquantaine de personnes. Ainsi, ma foi a grandi et mûri auprès de tous les paroissiens que je rencontrais et côtoyais régulièrement. Le dernier « électro choc » fut lorsque le maire d’un village voisin, veuf ayant plusieurs enfants, a annoncé qu’il allait devenir prêtre. Tout cela m’a permis de dire enfin oui au Seigneur. En fait, j’aime résumer ma vocation en prenant une image qui me tient à cœur parce que proche de mon ancien métier. Le Seigneur a semé une petite graine en mon cœur lors de mon baptême, il l’a fait germer vers l’âge de 12 ans lorsque j’ai eu l’intuition que le Seigneur m’appelait, j’emploie cette expression car je n’ai pas entendu à proprement parler de voix qui m’appelait. Mais, cette graine ne pouvait pas pousser et grandir car elle n’avait pas un environnement favorable, je dirai porteur, il lui manquait le terreau, l’engrais, l’eau pour qu’elle pousse. Cette graine les a trouvés dans le contact et les relations avec toutes ces personnes chrétiennes qui m’ont portée dans ma vocation qui a pu éclore. Les « électro-chocs » du Seigneur sont les coups de fouet (engrais) que l’on donne aux plantes pour qu’elles poussent plus vite ! J’ai d’abord pensé à une vie religieuse apostolique et missionnaire pouvant allier mes 2 vocations, religieuse et celle proche de la nature et de l’agriculture. Connaissant un peu l’Afrique, je me suis d’abord orientée vers ces pays qui ont tant besoin d’aide pour subvenir à leurs besoins ; puis je me suis tournée en France vers les communautés implantées dans les campagnes souvent déchristianisées et c’est seulement en dernier lieu que ma recherche s’est portée sur la vie monastique que je ne connaissais absolument pas. Mon métier m’avait fait découvrir Igny et ses environs, la zone agricole du Tardenois, très belle et vallonnée. C’est ainsi que naturellement j’ai demandé à faire un stage à Igny puis y suis rentrée. J’y ai découvert la vie cistercienne dont la spiritualité basée sur le travail de nos mains, à l’origine le travail de la terre, et la prière « ora et labora » me convenaient parfaitement et correspondaient à mes aspirations. Jusqu’à aujourd’hui, malgré les nombreux bouleversements intervenus en une vingtaine d’années (une trentaine de sœurs décédées, le regroupement de 4 communautés cisterciennes à Igny, la rénovation de tous les bâtiments, le vieillissement inexorable de chacune d’entre nous…), ma recherche du Seigneur et le désir de m’unir à Lui de plus en plus intimement sont toujours ma priorité et restent le but poursuivi de toute moniale. Ceci est toute ma joie profonde et me permet de témoigner du prénom que mes parents m’ont choisi : Joël, la joie de Dieu, la joie en Dieu. Soeur Joëlle |
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Ceux qui embrassent la vie consacrée, hommes et femmes, se situent, par la nature même de leur choix, en acteurs privilégiés de la recherche de Dieu qui anime depuis toujours le cœur de l'homme et le conduit dans de multiples voies d'ascèse et de spiritualité. ... Les personnes consacrées, vivant de manière cohérente et en plénitude leurs engagements pris librement, peuvent présenter des réponses aux aspirations de leurs contemporains et leur éviter de recourir à des solutions pour le moins illusoires et souvent négatrices de l'Incarnation salvifique du Christ ... Toute personne consacrée doit former en elle l'homme intérieur qui ne s'évade pas de l'histoire ni ne se replie sur lui-même. En vivant à l'écoute obéissante de la Parole dont l'Église est la gardienne et l'interprète, elle fait percevoir dans le Christ suprêmement aimé et dans le mystère trinitaire l'objet de l'aspiration profonde du cœur humain et le terme de tout itinéraire religieux sincèrement ouvert à la transcendance. (Vita consecrata n°103) |