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« Vanité des vanités, disait Qohèleth. Vanité des vanités, tout est vanité ! » (Qo I,2)

« Vanité des vanités, tout est vanité », dit Qohèleth. N’allons même pas comprendre que tout ne serait qu’orgueil ou satisfaction de soi. La réalité est autrement plus banale aux yeux du sage : tout est littéralement « buée » ou « vapeur ». Tu travailles pour amasser des biens, te voilà riche ; et soudain tu meurs et tu retournes à la poussière. Ta vie est comme une buée sur la vitre de la fenêtre et dans ce cas tu peux même te considérer comme un bienheureux car ta vie peut aussi être un cauchemar. Quelle récompense l’homme tire-t-il de toute la peine qu’il prend ? Rien de nouveau sous le soleil : hier comme aujourd’hui, les héritiers sont à l’affût ; ils s’entredéchirent sans se rendre compte que c’est pour du vent : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage ! »

Pour survivre, faut-il vivre désabusé, comme semble l’être Qohélet, ce sage de la Bible ? Et donc profiter de l’instant présent sans trop spéculer sur l’avenir ? Carpe diem, disaient aussi les Epicuriens. Un peu comme cet homme que l’évangile d’aujourd’hui vient d’appeler un insensé parce qu’il se dit en lui-même : « Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence ». Comprenons bien ! Si cet homme est traité de fou, ce n’est pas parce qu’il aspire à se reposer, à boire et à manger. Ce sont là des activités humaines tout à fait normales, que Jésus lui-même n’a pas méprisées. Si cet homme est insensé, c’est parce qu’il ne cherche qu’à jouir de la vie sans voir plus loin que le bout de son nez. « Regardez les lys des champs », dit Jésus qui est lui aussi un sage. Comprenons : « Captez l’instant présent non pas en jouissant de cet instant pour lui-même mais en saisissant le poids de grâce qu’il vous offre ! » A l’absurdité d’une sagesse qui ne serait qu’humaine, Jésus oppose la grâce de Dieu. C’est cette grâce qui nous enveloppe à chaque instant depuis que, par notre baptême dans la mort et la Résurrection du Christ, nous avons revêtu l’homme nouveau.

« Vanité des vanités » mais aussi « grâce des grâces » car tout instant vaut son poids d’éternité. La vie de celui qui ne profite que du moment présent est fondamentalement la même que celle de celui qui vit dans l’espérance. La différence ne dépend que du sens que l’on donne à la vie humaine : tout est absurde ou tout est plénitude de grâce. Nous qui sommes les disciples du Christ, nous avons décidé de vivre dans l’espérance et de nous laisser façonner par la grâce. Chaque matin, « un jour nouveau commence » et, dans la foi, il est illuminé par la Résurrection du Christ. Chaque soir, la nuit qui vient nous rappelle que notre vie est cachée en Christ.

L’opposé de l’absurdité, c’est la grâce de Dieu. A vue humaine, il est bien vrai que tout n’est que vent et fumée. A vue divine, nous sommes ressuscités avec le Christ et c’est la raison pour laquelle l’Apôtre Paul nous invite à « rechercher les réalités d’en haut ». Non pas en nous évadant de ce monde puisque chaque instant vaut son poids d’éternité mais en vivant selon la grâce : c’est dans la banalité du quotidien que nous sommes les disciples du Christ mort et Ressuscité, qui nous appelle à vivre avec lui.

La vraie valeur d’une vie ne se mesure pas aux richesses accumulées et entassées, puisqu’un jour il faudra bien les laisser. Nous n’avons le droit d’être riches qu’en vue de Dieu, c’est-à-dire en nous ouvrant aux autres qui nous sont donnés comme des frères et des sœurs à aimer et en nous ouvrant à l’Autre, c’est-à-dire à Dieu de qui nous fait entrer dans la vie éternelle.

Apprenons à devenir des pauvres en esprit, c’est-à-dire des riches en vue de Dieu.

Père Jean-François Baudoz

(Homélie pour le 18ème dimanche ordinaire C)

 
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